Nom : La prison abandonnée État : démoli Année de visite : 2013
« Quasiment aucun ». Voilà ce qui ressort des droits que disposent les prisonniers français après lecture du document d’entrée de prison laissé au sol. Visiter une prison, c’est particulier. On se prend en pleine face pas mal de choses. Du manque de droits aux conditions difficiles de vie, l’ambiance de ce lieu est vraiment particulière. Mais au moment de rentrer dans le lieu, je ne sais rien de tout ça. J’approche tranquillement en voiture et tombe nez-à-nez avec un squat extérieur assez impressionnant. Un réseau entier de ferrailleur s’est installé sur le lieu. Il ne leur a pas fallu beaucoup de temps pour trouver ce petit paradis. Les autorités, elles, semblent les laisser faire. Nous contournons donc ce camp pour passer par un autre chemin qui semble se dessiner devant nous. L’avantage des lieux où il y a un peu de passage, c’est sûrement la voie tracée qui s’offre à quiconque souhaite entrer dans le lieu. Rapidement, nous pénétrons l’enceinte. Nous ne sommes pas seuls. Alors qu’il y a un an, des amis pénétraient dans ce lieu vierge de tags et très peu exploré, j’ai pour ma part peut-être attendu un peu trop. En effet, si la garde à vue ne fait pas rêver les aventuriers en herbe de l’exploration et du graph, cette prison au contraire les attire.
À peine entré dans l’enceinte, mon petit groupe en croise un autre bien plus grand. Nous décidons d’aller explorer de notre côté en prenant un chemin inverse au leurs. Plus tard, nous croiseront trois autres groupes, dont un qui a dormi là la nuit, pouvant grâce à ça, entendre le manège nocturne des ferrailleurs. Je n’ai pas l’habitude de croiser autant de monde, mais faut faire avec, le lieu commence vraiment à se faire connaître, j’ai bien fait de m’y rendre maintenant. Nous arrivons dans une première aile de la prison.
Plusieurs étages de cellules se présentent devant nous. De chaque pièce, une ambiance propre, une personnalisation des hôtes sur les murs. Photos, écritures, dessins, on y voit les rêves de chacun. Des filles d’un côté, des voitures de l’autre… chaque pièce est unique. Ceux qui sont placés sur les derniers étages sont sûrement les plus chanceux, plus on est haut, plus la lumière de la verrière est importante.
Je rejoins le dôme central et découvre d’autres ailes qui en partent. Elles ne se ressemblent pas. Une d’elle est particulièrement petite et une autre, vraiment horrible. Et pour cause, on y trouve un étage avec vraiment très peu de lumière. Comment peut-on vivre dans ces conditions ? J’imagine les prisonniers rêver d’un étage supérieur où la lumière, est bien plus présente. Au fond d’un couloir, certaines cellules sont un peu différente, peut-être des cellules d’isolement ?
Tout autour, les murs sont en mauvais état. Dur de penser que ceux sont les visiteurs comme moi ou le temps écoulé depuis la fermeture qui a fait ça. L’état était sûrement le même quand la prison était ouverte. Je pense alors à tous ces reportages que j’ai pu voir par hasard en allumant la télévision. Ce que je vois n’est sûrement qu’une première façade de la précarité de ces lieux, je n’ose pas imaginer le reste. Je quitte peu à peu les zones de cellules pour rejoindre l’administration, mais aussi les cours. J’en découvre plusieurs. Certaines sont immenses, d’autres contiennent des terrains de jeux et enfin, quelques-unes sont minuscules. À peine 4-5m2 à tout cassé. Dans ces cours, on voit les hauts murs que j’ai dû traverser plus tôt pour entrer, mais aussi les différents miradors. En l’air, sur les barbelés, des ballons dégonflés, des chaussures, des vêtements ou encore des bouteilles d’eau.
En levant la tête, je découvre quelques tags sur les toits. À chaque lieu que je visite, j’ai toujours ce vieux réflexe de grimper coûte que coûte sur le toit. Pour cette fois, ça ne sera pas possible : je ne trouve pas d’accès ! Dommage. L’accès du lieu lui, en tout cas, ne sera pas resté ouvert très longtemps. Les autorités le ferme deux jours après ma visite. Néanmoins, vu l’état actuel du lieu, on voit bien qu’il ne reste jamais fermé très longtemps. Rien d’étonnant… car si les autorités font la chasse aux touristes un peu trop curieux qui trouvent comment entrer dans cette prison, elle est bizarrement beaucoup moins regardante sur l’énorme trafique de ferraille qui s’y déroule depuis des mois. Il faudra attendre novembre 2016 pour que la prison de Loos – Lille finisse par tomber au sol.